[ 5 ans, l'âge que tu n'auras jamais ]

Mon petit bébé, 

Du haut de tes 5 ans, tu ne me laisses pas de répit. 
Ta vivacité absorbe toute mon énergie, aucune bêtise ne te résiste. 
Aujourd’hui c’est ton anniversaire, toute la famille est réunie. 
J’espère que la maison résistera à ton excitation !
Je dois résonner ton grand frère qui me demande s’il pourra souffler tes bougies et ouvrir un ou deux de tes paquets, voire tous...
D'ailleurs, les nombreux cadeaux s’empilent sur l'espace réservé à cet effet, et je me demande où l’on va bien pouvoir ranger toutes ces surprises qui me semblent bien encombrantes si ce n'est même un peu trop bruyantes !

C'est l’effervescence autour de toi, tu accapares tes papys-mamies qui n'en demandaient certainement pas tant !

Quelques allées et venues de la cuisine au barbecue puis je dépose les feuilletés sur ma jolie table décorée avec attention spécialement pour cette occasion. Ton père commence à remplir les verres de punch pour les uns, de kirs pour les autres. Je vérifie que le champagne soit bien au frais pour accompagner ce dessert dont j'espère vraiment que le goût ne se référera pas à son apparence (ce tuto de gâteau à la pate fimo semblait pourtant si simple …)
Je te surveille du coin de l’œil et je m'aperçois que tu es trempé de la tête aux pieds ; je te soupçonne d'avoir joué avec l'eau des poissons et la ferveur que tu mets à le nier me laisse peu de doutes sur ta culpabilité.
Je me dépêche d'aller récupérer un vêtement sec dans ta chambre mais avant de redescendre, je m'octroie quelques instants ; assise sur ton lit, je me souviens avec tendresse et émotion du jour de ta naissance.

Tu étais si désiré. 
Ton frère nous a tellement comblés de bonheur et de joie, qu’il nous a donné l’envie de toi. 
Ma première grossesse était si épanouissante qu’il me tardait de revivre ces moments de bonheur intense et magique.
Mais j’avoue qu’avec un petit gars de 3 ans à la maison, ce congé maternité n’a pas été aussi reposant que la première fois 😅
J’ai quand même pu nous préserver quelques moments bien à nous, qui resteront précieusement et à jamais dans mon cœur. 

Ton père était tout aussi impatient de faire ta connaissance. 
Cette fois-ci, nous n’avions pas voulu connaitre le sexe, nous voulions être surpris par la vie car on savait que fille ou garçon, cela ne ferait aucune différence pour nous.

Et puis te voilà … toi ! 

Ma deuxième merveille ! J’avais si peur de ne pas pouvoir t’aimer autant que ton grand frère tellement mon amour pour lui était grand mais je me suis rendu compte qu’il n’en était rien et je vous aime tous les deux, si fort et si différemment. Je vous aime de manière unique. 

Oh oui, intensément je vous aime… 

Pourtant, ce n’est pas tous les jours facile ; les chamailleries, les jalousies, chacun cherche sa place. 
Mais même dans vos disputes j’arrive à distinguer toute l’affection que vous vous portez. 
Et quand Titou prend son rôle de grand frère au sérieux, il devient si attentionné envers toi. 

Parfois je me demande si c’est nous qui t’éduquons ou si c’est lui. 

Je suis si fière de vous mes enfants, si fière de notre famille imparfaite. 

Car même si je suis souvent fatiguée devant toutes vos facéties et même si je me sens souvent délaissée quand votre père est pris par ses obligations et que je me retrouve dépassée par ce quotidien… ces difficultés sont vite oubliées quand nous sommes tous les quatre en train de rire devant les grimaces de Louis de Funès ou jouer à cache-cache dans le jardin. 
Dans ces moments-là, je me surprends même à songer à un petit troisième ...

Tout d'un coup, un cri me sors de ma rêverie, je vous entends vous chicanez pour la dernière chips ! 

Je redescends à toute vitesse pour mettre un terme à ce chantage futile, en réapprovisionnant le plat, de ces fines tranches végétales, frites dans l'huile, dont vous raffolez !
Je troque ta jolie tenue achetée pour l'évènement contre un habit froissé et profite de ton ventre à l'air pour y déposer 3000 bisous, je m'enivre de ton rire tout en te chantonnant un joyeux anniversaire au creux de ton oreille !

Oui, mon cœur, aujourd’hui tu as 5 ans et c’est l’âge que tu n’auras jamais.



Malgré les aléas de la vie, j’ai longtemps voulu croire que j’allais quand même un jour pouvoir te rencontrer. 
Dans cette famille ou dans une autre. 
Mais il n’est pas évident de faire face à cette peur d'un nouvel échec et je crois que je ne survivrai pas à une autre garde partagée. 
Alors les mois s’écoulent, mon âge avance, mon cœur et ma raison (pour une fois qu’ils s’entendent ces deux-là !) me soufflent de renoncer à toi.

Et voilà comment tu deviens un des plus grands regrets de ma vie. 

Je sais que je t'aurais aimé comme je l'ai décris plus haut, peu importe que tu sois fille ou garçon, parce que cet amour il est là, dans mes tripes. Il déborde, alors je l'offre entièrement à ton frère puisque tu n'es pas là. J'espère quand même ne pas l'étouffer avec tout ce trop-plein !

Je t'aurais au moins (peut-être) épargné une vie divisée entre papa et moi.
Peut-être l'aurais-tu moins bien vécu que Titou ; puis-je penser pour me consoler. 


A toi, mon deuxième enfant que je n'aurais pas, tu manques à ma vie.


© Une semaine sur deux

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